Les préfectures exigent de la personne étrangère qui a obtenu un titre des séjour de présenter un passeport valide, un document quasi impossible à obtenir des consulats de nombreux pays. Que faire?Samedi dernier ont eu lieu, à Versailles, les assises des lycéens sans papiers des Yvelines, organisées par RESF 78, auxquelles j’ai participé comme membre de la LDH.
Parmi les situations, rencontrées relativement souvent, qui font que les jeunes n’ont pas de papiers, il y a celle des jeunes « sans passeport valide »; ces jeunes pourraient être régularisés ou même avoir un titre de plein droit s’ils avaient un passeport. Les raisons pour lesquelles ces jeunes n’ont pas de passeport valide sont le plus souvent soit « politiques », liées à la situation de leur pays d’origine (cas des Mauritaniens, des personnes de nationalités issues de l’ex-URSS, etc…), soit familiales, liées à des situations familiales complexes dont le jeune n’est en rien responsable.
Dans la plupart des cas, lorsque le jeune se présente au consulat du pays dont il a la nationalité pour demander un passeport, on lui répond que le consulat ne peut peut pas lui établir ce passeport, mais qu’il faut qu’il se rende dans son pays d’origine pour obtenir le passeport ou pour faire telle ou telle démarche préalable, nécessaire à l’obtention du passeport (par ex se faire recenser, demander une carte d’identité, etc…). Mais il est pratiquement impossible pour ces jeunes de se rendre dans leur pays d’origine, d’une part parce que souvent ils n’y ont plus d’attache, pas d’argent pour payer le voyage, qu’ils ont peur d’y aller…et surtout parce que, n’ayant pas de titre de séjour, s’ils vont là-bas, ils craignent, à juste titre, de ne jamais pouvoir rentrer en France.
Ci joint texte de RESF-78 décrivant ces situations.
Une délégation de RESF-78 a été reçue mercredi 11 février, par le chef du bureau de l’immigration de la préfecture de Versailles. Les dossiers des jeunes sans passeport valide ont été déposés ou rappelés (pour ceux qui étaient déjà déposés). On est en attente de réponses.
Pour certains dossiers le représentant de la préfecture a dit « on va interroger le ministère ».
Mes questions sont les suivantes: je suppose que ces situations existent aussi dans les autres départements? Comment sont-elles réglées? Est-ce que la LDH est déjà intervenu sur ce sujet?
Du point de vue des droits fondamentaux, il semble absurde qu’un jeune qui vit en France depuis son enfance ou son adolescence, dont la vie et les attaches sont « ici » se trouve sans papier du fait des soubresauts politiques ou des lois d’un pays avec lequel il n’a plus ou très peu d’attaches, ou de situations familiales particulières qui ne sont pas de sa responsabilité.
Nous suivons à notre permanence LDH un jeune homme qui est dans une situation de ce type, particulièrement ubuesque.
Le jeune G. est né en au Vénezuela en juin 1995. Ses deux parents sont de nationalité portugaise, mais lui est de nationalité vénézuélienne. Il est arrivé en France en décembre 2002, à l’âge de 7 ans, avec un passeport vénézuélien valable jusqu’en 2007 qui n’a jamais été prolongé depuis. Il n’a pas d’autre papier d’identité que ce passeport.
Il vit depuis son arrivée en France avec sa mère, de nationalité portugaise, en situation régulière. Il a été scolarisé en France du CE1 à la terminale. Il a obtenu un bac professionnel en juillet 2014. Il était inscrit pour l’année 2014-2015 pour un BTS par apprentissage, mais, n’ayant pas de carte de séjour l’autorisant à travailler, il n’a pas pu trouver de patron. Ses études sont donc interrompue du fait de la situation.
Ses démarches « tournent en rond »:
– Il s’est rendu de nombreuses fois au consulat du Vénézuela où on lui a dit qu’on ne pouvait pas prolonger son passeport, et qu’il fallait qu’il se rende au Vénézuela pour se faire établir une carte d’identité préalablement à un nouveau passeport.
– Dès ses 18 ans, il s’est présenté à la préfecture de Versailles pour demander un titre de séjour, mais comme il n’avait pas de passeport valide, sa situation n’a pas été examinée (refus guichet).
– Il s’est présenté au consulat du Portugal pour demander la nationalité portugaise du fait de la nationalité de ses parents: on lui a répondu que pour faire valoir son droit à la nationalité portugaise, il fallait qu’il présente un papier d’identité en cours de validité (passeport ou carte d’identité vénézuélienne).
Il est alors venu à notre permanence.
– D’une part, nous lui avons conseillé de demander un rendez-vous avec le délégué du consul du Venezuela, pour passer la barrière du guichet, expliquer sa situation et essayer d’obtenir un passeport, ou du moins un document d’identité. Il a finalement obtenu avec difficulté ce rendez-vous. Le consul lui a fait établir tout récemment (fin janvier) un certificat d’identité avec photo précisant que « selon la législation vénézuélienne en vigueur, M. G doit faire la première demande de carte d’identité directement au Venezuela avant d’obtenir un nouveau passeport biométrique ».
– D’autre part nous lui avons conseillé de se joindre au groupe de jeunes majeurs organisé par RESF pour que son dossier soit présenté et défendu à la préfecture dans ce cadre. Nous sommes dans l’attente d’une réponse de la préfecture (voir ci dessus)
– Après qu’il ait obtenu le certificat d’identité du consul du Venezuela, nous lui avons conseillé de tenter de faire à nouveau une démarche auprès du consulat du Portugal.
Que faire si la préfecture persiste à exiger un passeport en cours de validité pour délivrer un titre de séjour?
Que faire en règle générale dans ces situations où les jeunes n’ont pas de passeport valide?
18 février 2015
Source : Section de Poissys de la LDH