Le collectif SOS jeunes majeurs de la Manche dénonce l’abandon par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) des jeunes majeurs au passage à leur majorité.
Le conseil départemental a décidé de remplacer le Contrat jeune majeur, qui accompagne les jeunes de 18 à 21 ans en proie à des difficultés sociales, par le dispositif jeunesse insertion Manche (Djim). Une décision qui fait polémique. Le collectif SOS Jeunes majeurs appelait à un rassemblement, mercredi 3 juin 2015, devant la maison du Département. Après avoir dénoncé la première version du texte datant de décembre 2014 qui excluait ceux qui n’étaient pas ressortissants de l’Union Européenne, les militants dénoncent une « discrimination indirecte ». Il faudra avoir bénéficié pendant au moins trois ans de l’aide aux mineurs pour intégrer le Djim. Ce qui exclut d’office les étrangers qui ne sont pas arrivés en France avant l’âge de 15 ans, ou même d’autres jeunes qui auraient connu leurs difficultés après cet âge-là.
Par une délibération en date du 11 décembre 2014 revue le 11 mai 2015 le conseil départemental de la Manche a approuvé la nouvelle version du volet enfance de son règlement d’aide sociale. Cette nouvelle version du règlement départemental met en œuvre une nouvelle aide extra légale intitulée « Dispositif Jeunesse Insertion Manche » (DJIM) à compter du 1er Juillet 2015 se substituant au « Contrat Jeune Majeur »( CJIM)
Le contrat jeune majeur est un dispositif, prévu par l’article L 222-1 du Code de l’Action Sociale et des Familles qui permettait aux jeunes majeurs âgés de 18 à 21 ans, éprouvant des difficultés d’insertion sociale faute de ressources et de soutien familial suffisants, d’être pris en charge à titre temporaire, par les services du conseil général. Il s’agit d’un dispositif législatif auquel le Conseil départemental ne saurait mettre fin même s’il est facultatif .
Ce nouveau dispositif extra légal est soumis à six critères cumulatifs, modifiés par la commission du 11.05, qu’il sera très difficile de remplir. Une de ces conditions est discriminante de façon indirecte car il faut avoir bénéficié d’au moins 3 ans de prise en charge par l’ASE, ce qui exclut un grand nombre de jeunes isolés notamment étrangers. Une autre condition est que le jeune ait un « projet réaliste » ce qui promet à ces jeunes une formation courte forcément sous qualifiée. Donner à ces jeunes une allocation du type RSA même s’il est écrit qu’ils seront suivis par un travailleur social nous semble insuffisant pour les mener à construire leur vie.
Pour certains de ces jeunes majeurs ayant bénéficié de la protection en tant que mineurs, issus de la Protection de l’Enfance, l’arrivée à la majorité risque d’ici fin juin de rimer avec rupture, lâchage, plongée dans le vide, chute libre autant de termes qui témoignent d’une réalité douloureuse et brutale. L’ONED (Observatoire national de l’Enfance en danger) dans un dossier intitulé « Entrer dans l’âge adulte : la préparation et l’accompagnement des jeunes en fin de mesure de protection », actes de la journée du 11 décembre 2009, fait le constat d’une « accession différée, plus longue et plus difficile des jeunes en protection de l’enfance au monde adulte dans la population générale. Ils doivent faire preuve d’autonomie plus rapidement, affronter toutes les transitions qu’implique ce passage en même temps tout en disposant d’un soutien familial plus faible et présentant davantage de vulnérabilité, comparé à la population générale. Les risques sont multiples : exclusion, déshérence, désaffiliation. »
L’accueil des jeunes de plus de 16 ans se fait actuellement dans des familles, dans des FJT ou en internat (foyer) éducatif. Or M Guerineau, dans son bilan des actions de l’ASE 50 du 9 sept 2014 note que les appartements d’accueil pour les plus de 16 ans, avec deux ou trois jeunes, « suivi d’un travailleur social et si besoin , et l’étayage d’un Technicien d’intervention sociale et familiale » est un type d’accueil déjà testé dans d’autres départements.
La première des compétences du Conseil Départemental est la solidarité dont la protection de l’enfance est un secteur important puisque le département de la Manche protège 1150 enfants en établissement ou en famille d’accueil et qu’il est légèrement au-dessus de la moyenne nationale : soit 2,1% de la moyenne nationale qui est de 1,9% en 2013 pour la population de 0à 20 ans .
Jeunes français comme étrangers, certains d’entre eux osent témoigner de leur angoisse devant ce qu’ils vivent comme un second abandon.
3 juin 2015
Source : Collectif SOS jeunes majeurs. Collectif des travailleurs sociaux de de Cherbourg S.O.S Protection de l’Enfance. Collectif Saint Lois pour le droit des étrangers. Collectif 50 pour les droits des étrangers. Itinérance. Collectif contre le racisme et les idées d’extrême droite de Cherbourg Itinérance sud Manche. Section d’Avranches de la Ligue des Droits de l’Homme. Port d’attache. Comité Anne Geneviève pour les droits des étrangers de Coutances.